ÊTRE AMI AVEC LES PERSONNES QUE L’ON MANAGE : BONNE OU MAUVAISE IDÉE ?
5 mins de lecture | Ivan Angiolini & Noémi Capell | Article | Management
Dans le monde professionnel comme dans la vie privée, des relations se créent avec les personnes les plus proches de nos valeurs. Ainsi, il arrive que deux personnes ayant un lien de subordination hiérarchique se rapprochent, voire deviennent amies.
S’il est important d’entretenir de bonnes relations avec son équipe, où se trouve la limite entre l’amical et le professionnel ? Peut-on être ami (et le rester) avec les personnes que l’on manage ? Si oui, quelles peuvent être les conséquences à cette amitié au travail ? Eléments de réponse dans cet article.
Tout dépend de la relation
Selon 67 % de nos répondants LinkedIn, la réponse est oui : on peut être ami avec son manager (d’après une enquête réalisée auprès de 1 600 personnes sur LinkedIn).
En réalité, tout dépend de la relation. Ainsi, bien souvent, les amitiés au travail sont cantonnées à un même niveau hiérarchique et dans ce cas-ci, elles sont plus simples et les risques sont moins élevés. Toutefois, on peut très bien s’être lié d’amitié avec l’un de ses collègues, avant d’avoir été promu au poste de manager.
Se pose alors la question de la difficulté pour la personne qui devient le managé d’accepter de se retrouver en dessous de son manager au niveau hiérarchique, et donc de recevoir des consignes. La transition n’est pas toujours évidente et la relation peut s’en retrouver entachée.
Devenir ami avec une personne de son entreprise qui, dès le début de la relation, n’appartient pas au même niveau hiérarchique est aussi compliqué : dans cette situation, la relation n’est jamais neutre. Les responsabilités qui incombent au manager ne s’accordent pas toujours avec le degré d’intimité inévitable dans une relation amicale. Le rapport manager/managé peut paraître inégal, créer des conflits d’intérêts et devenir alors problématique.
Un piège : les privilèges
N’oubliez pas que le sentiment d’injustice, tout comme le manque de reconnaissance, sont deux des principaux facteurs de démotivation au travail.
« Attention, même si vous êtes capable de rester impartial et de faire preuve d’équité à l'égard de vos amis-managés, les autres membres de l’équipe peuvent ne pas voir les choses du même œil. »
L’un des plus gros dangers est celui des privilèges. En effet, si vous entretenez une relation plus étroite avec l’une des personnes que vous managez, le reste de l’équipe pourrait craindre que ce dernier reçoive un traitement de faveur de votre part.
Veillez à ne pas confier à cette personne les missions les plus convoitées, les projets les plus intéressants et montrez à vos collègues que votre ami et collègue ne fait pas l’objet de favoritisme.
Toutefois attention, même si vous êtes capable de rester impartial et de faire preuve d’équité à l'égard de vos amis-managés, les autres membres de l’équipe peuvent ne pas voir les choses du même œil.
Par exemple, si vous donnez à votre ami un gros client, un projet intéressant ou une augmentation, les autres collaborateurs peuvent se demander si ce client/projet/augmentation était réellement justifié ou non. Ce problème de perception peut être dangereux et pénalisant pour toute l’équipe. Des rumeurs pourraient alors se répandre et créer une ambiance délétère au sein de l’équipe, voire provoquer une mise à l’écart du managé-ami et vos capacités à gérer une équipe pourraient être remises en question.
Bien définir les limites de la relation
Si l’une des personnes que vous managez et avec laquelle vous êtes particulièrement proche franchit la limite entre le professionnel et le familier, par exemple en vous dénigrant ou en plaisantant devant les nouveaux arrivants, vous devrez intervenir rapidement. Expliquez-lui, en privé, que pendant les heures de travail, ils doivent vous traiter comme n'importe quel manager, car vous les managerez comme n'importe quel autre collaborateur.
Vous ne pouvez pas donner l'impression d'accorder un traitement différent simplement parce que vous êtes amis. Il n'est pas nécessaire d'être sévère, mais simplement assertif.
L’inverse est vrai également, ce n’est pas parce que vous vous sentez proche de ce collègue que vous pouvez vous laisser aller à certaines libertés, par exemple en vous moquant de lui (même si vous pensez que vous le faites gentiment) ou en faisant référence à des sujets d’ordre privé dans l’open space.
Chacun son rôle
Peu importe à quel point vous vous entendez bien avec vos collaborateurs, vous restez leur manager. Vous leur assignez des tâches, évaluez leurs performances, et vous avez la responsabilité de leur adresser des critiques constructives pour les faire grandir. L'amitié peut compliquer cette dynamique et rendre difficile l'exécution efficace de votre travail, qui devrait toujours être votre priorité absolue.
Par exemple, en étant ami avec la personne que l’on manage, faire des retours objectifs sur ses compétences professionnelles devient plus compliqué, notamment lorsqu’il s’agit de dénoncer un retard sur un projet ou certaines difficultés professionnelles. Ce feedback pourrait être pris pour des reproches d’ordre personnel et ainsi nourrir chez le salarié-ami du ressentiment à votre égard. De même en cas de désaccord sur un sujet pro, le managé pourrait en faire une affaire personnelle si ses choix sont remis en question.
Face à ce risque, définissez au plus tôt des règles de conduite ensemble et les limites à ne pas franchir au bureau comme dans le privé, par exemple en évitant d’aborder des sujets d’ordre professionnel en dehors du bureau.
L’âge et la génération
Les relations managers-subordonnés sont plus courantes chez la génération Y et les jeunes générations chez lesquelles le fossé générationnel est moins profond que chez les générations précédentes. Avec le développement des nouvelles technologies, le niveau d’information est le même pour tous et les personnes plus âgées deviennent davantage des coachs et des mentors que des personnes autoritaires qu’on pourrait craindre.
Finalement, le secret de l’amitié entre un manager et son managé est d’entretenir une relation positive, constructive et de confiance en veillant à ce qu’elle n’interfère pas avec le travail. Vous devez vous assurer de fixer des limites et de ne pas laisser votre relation prendre le pas sur vos responsabilités managériales. C'est un exercice d'équilibre, mais un exercice nécessaire pour bien manager.
À propos de l'auteur
IVAN ANGIOLINI - MANAGER BUREAU SENIOR • DIJON
Issu d’une école de commerce avec une spécialisation en Management des Organisations et des Ressources Humaines, Ivan présente une expérience de plus de 7 ans dans le recrutement.
Après un stage de fin d’étude dans le travail temporaire, il intègre Hays en Septembre 2015 sur la division Industrie.
Après un an passé sur des profils plutôt techniciens, Ivan se spécialise sur les métiers d’encadrement en Industrie (Top et Middle management). Il accompagne les clients dans la recherche de leurs nouveaux talents ainsi que les candidats dans leurs recherches professionnelles.
En parallèle, Ivan évolue sur des fonctions managériales et encadre une équipe de consultants sur des métiers techniques en CDI, puis prend la direction du bureau de Dijon en Mars 2021 avec une équipe de 12 consultants.