HUSTLE CULTURE : COMMENT NE PAS LA LAISSER S’INSTALLER ?
13 mins de lecture | Morgane Rupert | Article | Culture des salariés
« On se reposera quand on sera mort » est un des dictons populaires sur le succès que beaucoup aiment répéter. Elon Musk a tweeté que « personne n'a jamais changé le monde en 40 heures par semaine » et même si cela peut paraître cliché, il est vrai que la réussite ne viendra pas à ceux qui ne s’investissent pas assez pour l'atteindre. La « hustle culture » ou culture de l’hyperproductivité glorifie ce genre de déclarations car elle normalise le surmenage professionnel au détriment de sa santé et de ses relations et a tendance à mépriser les personnes qui choisissent l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée.
Travailler dur est différent du surmenage, nous devons apprendre à faire la différence et reconnaitre les signaux d’alerte lorsque collègues, collaborateurs ou nous-mêmes sommes en train de franchir la limite.
1. Une fausse bonne idée
Ces dernières années, avec l’essor du « story-telling » autour de l’entrepreunariat, la productivité à outrance a été romancée et nombreux sont ceux qui pensent que travailler dur pour réussir signifie faire des heures supplémentaires, oublier les week-ends et ne pas se reposer, mais pouvez-vous réellement profiter des revenus de votre dur labeur avec des conditions mentales et physiques malsaines, et un état d'esprit qui vous fait sentir que vous n'êtes jamais assez?
Sous une apparence de bienveillance et de de motivation, la « hustle culture » est en réalité une fausse bonne idée qui prône qu’on ne peut être efficace qu’en étant hyperproductif et que le respect s’acquiert en se surmenant et en utilisant chaque instant de son existence à réaliser des choses productives.
Les personnes qui romancent la productivité à outrance croient en l'idée de ne pas s'arrêter lorsqu'elles sont fatiguées, mais de s'arrêter une fois que tout est terminé. Travailleuses insatiables, elles passent presque tout leurs temps au travail, détestant même le besoin de dormir. Pour elles, le but de l'existence est le travail, toujours plus intense, plus passionné... Travailler, performer, pour elles, c’est la seule chose qui compte.
Cependant le travail étant un cycle sans fin, elles n'en auront jamais fini, à moins de s’arrêter pour se concentrer sur leur vie personnelle.
2. Comment la « hustle culture » se manifeste au travail?
La culture de travail de votre entreprise joue un rôle clé dans la satisfaction, l'engagement et la productivité de ses salariés. Mais la « hustle culture » peut avoir un impact négatif sur ces trois facteurs.
Alors comment savoir si l'hyperproductivité est devenue la norme sur votre lieu de travail ? Voici quelques signes importants:
- Les collaborateurs sont félicités voire récompensés pour leurs longues heures de travail.
- Les gens envoient des e-mails et des messages à toute heure, y compris le week-end.
- Il est monnaie courante de faire preuve de zèle, notamment en se vantant de ne pas dormir suffisamment, de sauter des repas pour travailler et d'autres habitudes malsaines.
- Les employés sont fiers de ne pas utiliser les jours de RTT (ou les employés sont encouragés à ne pas prendre de RTT)
- Il semble que le travail soit la chose la plus importante pour tout le monde - et qu'il ne soit pas normal d'avoir une vie personnelle.
- Lorsque quelqu'un demande de l'aide, on lui dit de "trouver une solution innovante", au lieu de lui offrir des ressources et un soutien plus conséquents.
Si l'une de ces situations vous est familière, il se peut que vous ayez affaire à un cas sérieux de « hustle culture ». Vous avez peut-être l'impression d'avoir ou de faire partie d’une équipe de travailleurs acharnés mais la vérité est que cette hyperproductivité n'est pas viable.
Pourquoi ? Les collaborateurs épuisés qui ne reçoivent pas de soutien sont très susceptibles de démissionner - et tant qu'ils sont dans l'entreprise, ils sont beaucoup moins productifs que ceux qui ont un bon équilibre entre vie professionnelle et vie privée.
Cette culture peut sembler glamour, mais elle exerce une pression immense sur toutes les personnes concernées - et les récents changements économiques comme l'inflation n'ont fait qu'amplifier cette pression.
3. Des attentes irréalistes
La « hustle culture » est populaire pour une raison. Beaucoup veulent croire qu'ils exercent une influence totale sur leur propre réussite. Et le surmenage est un excellent moyen de se sentir maître de la situation, jusqu'à ce que votre bien-être commence à en souffrir.
Le fait de vous retrouver piégé dans la « hustle culture » vous amène à avoir des attentes irréalistes de sorte que vous ne saurez plus apprécier vos petites réalisations. La pensée qu’il y a des défis toujours plus grands à remporter vous empêchera de célébrer vos petites victoires.
Cette culture toxique nous dit que même si nous travaillons de plus en plus dur, nous pouvons toujours avoir plus, faire plus et être plus. Cela signifie que les limites du but à atteindre ne cesseront de reculer, quels que soient les résultats.
En effet, si en surface la « hustle culture » prône qu’on peut tout réussir si on s’y consacre à 100%, il faut accepter que le travail ne soit pas le seul facteur de l’équation et, malgré tous nos efforts, il arrive parfois que l’échec soit la seule issue. C’est même souvent le seul moyen d’apprendre et de progresser.
La vérité est que ce cycle de travail acharné et d'objectifs changeant constamment mène à l'épuisement. Il requiert de mettre notre bien-être de côté afin d'atteindre une définition très étriquée et toxique de la réussite.
4. Un impact négatif sur votre santé mentale et physique
Prenez un moment pour faire le point. Ressentez-vous un sentiment de culpabilité lorsque vous pensez à prendre un jour de congé? Avez-vous du mal à vous détendre lorsque vous avez plus de temps libre? C'est parce que la culpabilité est l'une des principales caractéristiques de la « hustle culture ».
Que vous soyez confronté à des problèmes personnels ou que vous n'ayez tout simplement pas assez dormi la nuit précédente, la pression exercée sur vos performances peut vous sembler écrasante. Ajoutez à cela la crainte d’être jugé moins performant et il vous sera très difficile de demander le soutien dont vous avez besoin. Et c'est logique: si vous vous rendez au travail tous les jours en sachant que votre patron attend de vous que vous vous démeniez davantage, l'anxiété sera au rendez-vous.
De plus, cette culture de l'agitation conduit naturellement à une positivité toxique. Si vous êtes toujours en train de travailler, vous pouvez avoir l'impression qu'il n'y a pas de place pour les émotions négatives. Mais qu'il s'agisse d'un client frustrant, d'un mauvais café ou d’un énième problème de métro, nous avons tous besoin de nous plaindre parfois.
Des études montrent qu'exprimer et accepter des sentiments négatifs est crucial pour la santé mentale. Donc, si vous ressentez la pression de dire « ça va » quand ça ne va pas, prenez un moment pour reconnaître vos sentiments et trouver un moyen de les traiter - même si c'est après les heures de travail.
La culture de l'ultra performance a de graves répercussions sur la santé mentale, mais elle ne s'arrête pas là. Avec le temps, l'excès de travail et le stress intense vont affecter votre corps et se manifester avec de l’hypertension artérielle, de la fatigue chronique et des insomnies, des migraines, des problèmes digestifs, des douleurs thoraciques…
5. Comment dire adieu à la « Hustle culture »?
Nous avons vu à quel point cette hyperactivité peut nuire à l’intégrité physique et mentale. La bonne nouvelle, c'est qu'il n'est pas nécessaire qu'il en soit ainsi : vous pouvez changer les choses.
-Fixez-vous des limites. Prenez régulièrement des pauses. Identifiez clairement ce qui draine votre énergie. Que faites-vous actuellement qui ne fait pas partie de votre fiche de poste? Passez-vous tout votre temps à aider vos collègues au lieu de faire votre propre travail? Restez-vous tard par perfectionnisme ou parce que vous y êtes obligé?
- N'ayez pas peur de demander de l'aide. Parfois, un coach, un thérapeute ou même un collègue peut être exactement ce dont vous avez besoin pour surmonter l'épuisement professionnel et transformer votre vie.
- Déterminez si tout ce qui figure sur votre to-do list est vraiment nécessaire. Vous savez très probablement quelles sont les tâches qui auront le plus d'impact sur votre travail. Concentrez votre énergie sur celles-ci et laissez le reste au second plan.
- Ce qui est prévu est le plus souvent accompli. Inscrivez du temps de repos sur votre calendrier, et traitez-le comme s'il s'agissait d'une réunion avec votre manager! N'oubliez pas : le repos est une stratégie de réussite à long terme. L'épuisement ne vous mènera nulle part.
La « hustle culture » promeut sa propre version du succès, qui est souvent très matérialiste. C'est bien, mais le rêve de tout le monde n'est pas de posséder un manoir ou de conduire une voiture de sport. Réfléchissez à ce qui est important pour vous : voulez-vous vraiment travailler 60 heures par semaine ? Ou préférez-vous créer des souvenirs avec vos amis et votre famille?
Lorsque les gens sont encouragés à supprimer leurs sentiments, à travailler de longues heures et à ne jamais prendre de congés, l'épuisement professionnel les conduit à ne plus s'intéresser à leur activité. Si un travail intense est nécessaire en période de rush, être surmené au point de ne plus avoir du temps pour soi est néfaste et contre-productif à long terme.
Cependant, lorsque l'épuisement professionnel est réduit, les employés viennent au travail avec plus d'énergie. Par conséquent, ils seront plus engagés, plus productifs et plus concentrés.Quels que soient vos objectifs, vous n'êtes pas obligé de céder à la glorification du surmenage. En donnant la priorité à votre équilibre personnel et à votre bien-être, vous pouvez atteindre durablement le succès, quel qu'il soit.
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À propos de l'auteur
Morgane Rupert - People and Culture Manager, en collaboration avec Ndèye-Fatou Thioye-Mezui.
De formation supérieure en Management des Ressources Humaines, Morgane présente une expérience de plus de 10 ans dans le recrutement. Après une expérience de consultante en recrutement et de Manager de la division RH et Juridique Senior chez Hays, elle valide un diplôme de Coach professionnel et personnel, et rejoint l’équipe People & Culture. Morgane intervient auprès des collaborateurs de Hays France & Luxembourg sur la gestion de Carrière & Mobilité et travaille également sur le bien-être au travail & engagement (programmes bien-être et l’engagement associatif ) et sur des projets RH transverses (parentalité, outils RH, enquêtes internes). »