QU'EST-CE QUE LE SYNDROME DU SCARABÉE ET COMMENT S'EN DÉTACHER ?
5 mins de lecture | Barbara Renouf & Noémi Capell | Article | Management
Le syndrome du scarabée désigne un biais cognitif inconscient qui inciterait les dirigeants et les managers à favoriser les salariés qui leur ressemblent. Les personnes n’appartenant pas au groupe dominant (car ils ne partagent pas le même point de vue, le même diplôme, le même milieu social, âge, etc.), auraient ainsi moins de chances d’obtenir une promotion et gravir les échelons. Explications et nos solutions pour se libérer de ce phénomène et encourager la diversité au sein de l’entreprise.
Le syndrome du scarabée, qu’est-ce que c’est ?
Tout commence dans les années 1950 et 1960 lorsque deux entomologistes de l’université de Chicago étudient le comportement de plusieurs espèces de coléoptères. Leur objectif : comprendre l’adaptation des espèces à leur environnement et vérifier laquelle prédomine.
Leur conclusion : ce n’est pas forcément l’espèce la mieux adaptée à l’environnement qui survit. En effet, les scarabées, connus pour manger leurs propres œufs, avaient encore plus d’appétit pour ceux des autres. Ils œuvrent ainsi à faire disparaître l’espèce opposée quand leurs œufs peuvent grandir.
Quelques décennies plus tard, George Akerlof (prix Nobel d’économie en 2001) et Pascal Michaillat, professeur d’économie à l’université Brown, reviennent sur ce constat scientifique et font un parallèle entre les scarabées et le monde de l’entreprise. Pour eux, les hommes font comme ces coléoptères : ils favorisent leur espèce au détriment des autres.
Des répercussions lourdes sur les entreprises et leurs collaborateurs
Qu’est-ce que cela signifie pour le monde de l’entreprise ?
En fait, selon ces chercheurs, les dirigeants et les managers privilégient les profils qui leur ressemblent, en particulier lorsqu’il s’agit de choisir quel collaborateur obtiendra une promotion ou au moment de recruter un nouveau talent. Qui se ressemble s’assemble.
D’après cette théorie, les managers auraient donc tendance à donner du pouvoir et des privilèges à ceux qu’ils considèrent comme leurs semblables, ceux qui partagent par exemple les mêmes points de vue, idées et valeurs, ceux qui proviennent du même milieu social, écoles/formations, ont suivi le même parcours professionnel, ont le même âge, sexe ou identité sexuelle.
Les femmes, les seniors et les profils issus de la diversité sont les principales victimes de ce syndrome qui entraîne des inégalités de salaire, les promotions et les négociations de hausse de salaire leur étant moins souvent accordées.
Du reste, l’homogénéité étant privilégiée au détriment de la diversité des profils, tous les salariés ont tendance à se ressembler, et cela a des conséquences négatives sur l’entreprise. On observe notamment dans une équipe trop homogène :
- Une moindre créativité
- Une incapacité à innover
- Moins d’idées neuves
- Une absence de débat
- Un manque de remise en question
Résultat, ce manque de diversité a des répercussions sur la productivité, la motivation, l’attractivité et la rétention des effectifs (le turnover est plus élevé). Sur le long terme, l’entreprise peut se laisser distancée par une concurrence plus jeune, pas encore touchée par ce biais cognitif et plus diversifiée.
Quelles sont les solutions ?
Heureusement, il existe des solutions et les entreprises peuvent prendre un certain nombre de mesures pour lutter contre ce syndrome et en particulier le manque de diversité au sein des équipes.
Prendre conscience de ces biais cognitifs
Le syndrome du scarabée étant un biais cognitif inconscient, ceux qui en souffrent ne s’en rendent pas toujours compte. Il faut donc d’abord apprendre à l’identifier et se renseigner pour prendre ensuite des décisions mesurées et réfléchies.
Pour savoir s’il est temps de vous remettre en question, observez votre équipe : les idées sont-elles généralement les mêmes ? Vos collaborateurs sont-ils toujours d’accord entre eux ? Attention, une vision unique et l’absence de débat et d’innovation peuvent être un frein au développement de l’entreprise.
Aussi, faites un travail d’introspection et réfléchissez à vos méthodes managériales : au moment de recruter ou d’accorder une promotion à un collaborateur, quels critères privilégiez-vous ? Sont-ils objectifs et basés sur leurs compétences uniquement ?
Prendre des décisions à plusieurs
Pour favoriser davantage de diversité et recruter des profils plus hétérogènes, une solution est de mener les recrutements et les entretiens annuels à plusieurs. De cette manière, les points de vue et les critères pris en compte sont plus variés. Dans le cadre d’un recrutement, vous pouvez par exemple réunir le futur manager du candidat et le Responsable des Ressources Humaines.
Signer une Charte de la diversité
Pour lutter contre le syndrome du scarabée mais pas seulement, l’entreprise peut signer une Charte de la diversité et s’engager à agir en faveur de la diversité et dépasser la lutte contre les discriminations.
Les entreprises confirment ainsi qu’elles s’engagent à :
- Encourager la diversité en termes de genre, âge, origines ethniques, orientation sexuelle, handicap, etc. de façon à refléter la diversité de la société dans ses effectifs.
- Mieux répartir les rôles des hommes et des femmes dans l’entreprise et garantir l’accès des salariés, quel que soit leur sexe, à tous les types de postes.
- Sensibiliser et former les dirigeants et les collaborateurs impliqués dans le recrutement aux enjeux de la non-discrimination et de la diversité.
- Communiquer auprès des collaborateurs leur engagement afin de les encourager au respect et au déploiement de ces principes.
- Faire de la mise en œuvre de la politique de diversité un objet de dialogue avec les représentants du personnel.
Aujourd’hui, la Charte de la diversité compte plus de 4 000 signataires, dont Hays France.
Dresser le bilan
Pour garantir un équilibre dans la répartition des rôles et la place de chacun à tous types de postes, l’entreprise doit évaluer régulièrement les progrès réalisés en produisant des statistiques : pourcentage de femmes recrutées, de femmes cadres ou membres du conseil d’administration, nombre de personnes en situation de handicap présentes dans les effectifs, etc.
Des comités d’entreprise plus égalitaires
Selon les deux économistes précités, plus la hiérarchie est importante au sein de l'organisation en question, et plus le phénomène du syndrome du scarabée est prononcé. Pour s’en détacher, l’une des actions à mettre en place est de s’assurer que les comités d’entreprise représentent toute la diversité des salariés de façon égalitaire.
À propos de l'auteur
BARBARA RENOUF - MANAGER SENIOR • LA ROCHELLE
De formation supérieure en Commerce International, réalisée en Allemagne, en Belgique et en Angleterre, Barbara débute sa carrière dans un cabinet de conseil RH basé à Dublin.
Après 7 ans passés à l’étranger et une expérience confirmée dans le recrutement, elle intègre Hays en 2016 et se spécialise dans le recrutement de Cadres commerciaux. Depuis 6 ans, Barbara accompagne les entreprises et les candidats de la région Ouest dans leur projet de développement professionnel et de recherche de nouveaux talents.
En parallèle, elle évolue sur des fonctions managériales en encadrant l’équipe de consultants dédiés au recrutement permanent CDI et prend la direction du bureau de La Rochelle en janvier 2022 avec une équipe de 11 consultants.